Interview
17 février 2016
L’Association internationale du transport aérien a récemment qualifié l’essor des drones de « menace réelle et croissante » pour la sécurité des avions de ligne. Que cela révèle-t-il en termes de réglementation ?
On assiste actuellement à une croissance du nombre de drones utilisés, d’une part pour le loisir, ou par les autorités publiques, qu’elles soient civiles ou militaires. Pour ce qui est de la réglementation, celle-ci évolue régulièrement pour s’adapter à la croissance du marché. La réglementation française vient juste d’être modifiée par un décret de décembre 2015. On distingue les vols à vue et hors vue. Dans tous les cas de figure, les agglomérations ne peuvent être survolées sauf autorisation préalable, de même que les approches d’aéroport. Le plafond de vol est limité à 150 mètres. Les opérateurs de drones pour le compte d’exploitant doivent avoir un brevet de télépilote.
Au-delà de 150 mètres, les drones ne peuvent voler sauf si l’espace aérien est fermé et leur est réservé (cas de la protection des grands événements internationaux où l’espace arien est fermé pour permettre le vol des drones). Tout est ainsi fait pour assurer une sécurité maximum, mais le problème est que tout ceci est nouveau, la réglementation n’est pas toujours connue et le marché est en pleine expansion.
Sur le plan international, la question de l’insertion des drones est envisagée au niveau européen dans le cadre de la mise en place du ciel unique européen. Le programme technologique SESAR envisage d’ailleurs cette question de l’insertion de ces drones dans le trafic aérien qui n’est pas possible aujourd’hui. Il faut développer les technologies Sense and Avoid, c’est-à-dire la capacité du drone à détecter lui-même un obstacle et à pouvoir l’éviter. Il faudra ensuite que les drones soient certifiés. On peut imaginer que vers 2020, une insertion des drones dans le trafic aérien sera sans doute possible. Les Américains sont de leur côté en train de développer leur propre législation et il y a une bataille de normes à ce niveau.
Quelle est la réalité de l’utilisation des drones par les armées modernes ?
On assiste aujourd’hui à un développement exponentiel des drones dans le domaine militaire. Dans les années 1990-2000, seuls les Israéliens et les Américains possédaient des drones, et il faut bien dire que les Européens ont pris du retard. Aujourd’hui, des programmes de drones se développent partout dans le monde, en Europe bien sûr mais aussi dans les pays émergents.
Les drones font l’objet d’une classification selon plusieurs types. Il y a d’abord la classification en fonction des capacités des drones en termes de zones d’emploi. Premièrement, il y a les drones tactiques, utilisés en général par l’armée de terre sur le champ de bataille. L’armée de terre française vient d’ailleurs de décider d’acquérir un nouveau drone, le Patroller, fabriqué par Sagem. Il y a des drones plus stratégiques, de moyenne altitude et longue endurance (drone MALE), qui vont pouvoir voler plus haut pendant 24 heures et surveiller une aire plus étendue : ce sont les Reaper américains que l’on utilise au Mali par exemple. C’est dans cette gamme que l’on essaie de lancer un programme européen avec les Allemands et les Italiens. Il y a aussi des drones qui vont voler à très haute altitude et avoir une grande endurance comme le Global Hawk américain.
Quelles nouvelles problématiques l’émergence des drones soulève-t-elle par rapport à la nature de la guerre ?
La principale problématique n’est pas tellement le développement des drones de surveillance mais de savoir si les drones doivent ou non être armés. Il y a une très grande prudence sur ce sujet, notamment en France. On sait que les Américains ont fait une utilisation massive des drones Reaper, avec une politique d’assassinats ciblés qui a malheureusement engendré de nombreux dommages collatéraux. Cela a donné une très mauvaise presse aux drones car leur utilisation s’est faite en violation du droit humanitaire et ceci explique la réticence française sur le sujet. Mais en réalité, la question n’est pas liée au drone en lui-même mais à l’usage que l’on fait de cette arme. La vraie question est de savoir dans quel cas de figure il sera plus utile d’utiliser un aéronef habité ou un drone armé. C’est une question de nature opérationnelle qui peut être liée à la capacité plus grande d’un drone de franchir des défenses ennemies – c’est la problématique du drone de combat auquel réfléchit Dassault – mais également au risque que l’on fait prendre au pilote qui pourrait justifier l’emploi d’un drone.
Par ailleurs, grâce au développement des technologies de l’intelligence artificielle, on se dirige de plus en plus vers des engins qui ont une certaine forme d’automatisation. Les drones Harfang qui sont encore opérés par l’armée française étaient des drones qui avaient la capacité de décoller et d’atterrir automatiquement, sans que l’opérateur intervienne. Cela va se généraliser et pas uniquement dans le domaine militaire : nous ne sommes plus loin de l’avion sans pilote ou de la voiture sans conducteur. La vraie question est de savoir jusqu’à quel point un drone pourra ou non choisir sa cible tout seul. Il est évident que cela pose un problème juridique. Cette question est évoquée à la conférence du désarmement à Genève. Le principe tend à interdire une automatisation totale avec ce que l’on appelle les « killer robots ». Mais la question est plus complexe et dépasse la simple interrogation de la présence d’un opérateur dans l’opération. Toutes les solutions intermédiaires sont en réalité possibles entre un contrôle total par l’humain et une absence totale de contrôle. C’est à ce niveau que le débat existe, entre savoir ce qu’il faut autoriser et ce qu’il faut interdire. C’est un nouveau champ d’étude pour ceux qui travaillent sur les questions de maîtrise des armements.
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