« Vous vous souvenez de la colonne de chars qui arrivait sur Kiev il y a un an ? Ce sont les drones qui les ont détruits en larguant des grenades sur leurs tourelles. » Ces observations sont celles de Patrice Rosier, le fondateur de Reflet du Monde, une entreprise de drones multi-applications basée en Gironde. Fort d’une veille technologique pointue, l’entrepreneur a scruté comment ces « ordinateurs volants » sont devenus stratégique dans le conflit ukrainien. Outil de surveillance, de renseignement, munition téléopérée : le drone s’est mué en arme de piraterie aussi accessible qu’efficace.
« L' »Apple » du drone, qui s’appelle DJI et qui est chinois, a organisé l’interdiction de vente de drones en Ukraine. Les Ukrainiens ont envoyé des demandes dans toute l’Europe pour se fournir, nous mêmes avons reçu des demandes. Mais vu que l’on revend la marque chinoise, ça n’a pas été possible d’y répondre. On a compris qu’en Europe, nous sommes très dépendants des produits asiatiques au niveau du drone », développe Patrice Rosier pour La Tribune.
Une colonne de chars russes lors de l’invasion en Ukraine en mars 2022. (crédits : Creative Commons)
Face à la domination des acteurs chinois, américains ou encore israéliens, la filière française du drone a déjà réagi. En mai 2021, une trentaine d’acteurs ont formé l’Association du drone de l’industrie française (Adif) pour répondre à un enjeu de structuration industrielle. « On a les capacités industrielles en France, mais si on reste avec une ribambelle de petits acteurs entre un et dix millions d’euros de chiffre d’affaires, personne ne sera taillé pour aller chercher ces marchés à plusieurs centaines de millions voire quelques milliards d’euros. C’est maintenant qu’il faut arriver à construire des acteurs significatifs ! », prévient Bastien Mancini. Le président de l’Adif et de la société toulousaine Delair, a présenté ces enjeux lors du Sofins, salon international dédié à l’innovation défense qui se déroule du 28 au 30 mars à côté de Bordeaux.
« Jouer cavalier seul desservira l’ensemble de cette filière »
Selon une étude de Levitate Capital de décembre 2020, les perspectives de marché doivent carrément exploser dans la décennie à venir au niveau mondial. Trois secteurs sont concernés : les entreprises, la défense et la logistique. Avec 34 milliards de dollars de potentiel économique, les États-Unis représenteront le plus gros marché en 2030, devant l’Asie (30 milliards) et l’Europe (16 milliards).
Le groupement français de la filière, qui avec une trentaine d’acteurs ne pèse que 100 millions d’euros de chiffre d’affaires, réfléchit à mutualiser les interfaces numériques de développement, les moyens de production et ainsi pourquoi pas à créer un site industriel pilote pour la fabrication des composants essentiels. Un enjeu de taille pour toute une chaîne de valeur aux ambitions aéronautiques, mais qui demeure bien moins structurée que ce secteur. Après la concurrence commerciale et technologique, place au partenariat vertueux ?
« Il faut d’abord travailler ensemble, pour grandir ensemble », en appelle Arnaud Rimokh, directeur délégué drones et nouveaux usages d’Aerospace Valley. « Jouer cavalier seul desservira l’ensemble de cette filière. » En Nouvelle-Aquitaine, une des régions qui regorge le plus d’acteurs du drones, une centaine d’entreprises composent les effectifs, pour une majorité d’industriels et de TPE. Avec l’éveil engendré par la guerre en Ukraine et les nécessités de décarbonation transversaux à tous les secteurs, ce tissu compte sur une croissance des financements publics et privés pour décoller.
Au plan national, cinq milliards d’euros vont être débloqués rien que pour les drones entre 2024 et 2030 dans le cadre de la prochaine Loi de programmation militaire. Certaines entreprises qui travaillaient déjà avec la Direction générale de l’armement connaissent une hausse des demandes depuis l’invasion russe en Ukraine. « L’Ukraine est un accélérateur mais c’était déjà un train en marche », tempère Arnaud Rimokh d’Aerospace Valley. Un train qui accuse pourtant un retard de développement à cause d’un manque de financements sur la dernière décennie.
Concurrence des prix
« Nous avions un projet de drone capable de voler pendant plusieurs heures à longue distance, avec des applications à la fois militaires et civiles. Nous n’avons jamais pu trouver les financements, à part auprès de la Région. Dix ans après, tout le monde est en train de chercher ce type de drone » rejoue, amer, Patrice Rosier qui cherchait 500.000 euros à l’époque. Il ajoute : « Le marché est là, l’enjeu il est clairement financier. »
Plusieurs entreprises du drone ont profité du Sofins 2023 pour témoigner des besoins de la filière. (crédits : MG / La Tribune)
Reflet du monde travaille sur la cybersécurité des systèmes d’exploitations des drones en créant son propre pilote automatique. Cette autonomie est un impondérable pour s’affranchir de la domination sino-américaine en matière de logiciel. « Il faut avoir des systèmes qui garantissent la protection vis-à-vis du piratage informatique » vise Bastien Mancini. « Plus largement, nous devons nous positionner sur le développement des briques technologiques autour du drone, car la technologie globale est déjà mature. »
Le président de Delair indique que le marché de la défense représente déjà 50 % des activités de la société toulousaine, titulaire d’un chiffre d’affaires de sept millions d’euros en 2022. La demande ne va aller qu’en s’accroissant d’ici 2030 et les Français veulent pouvoir y répondre, même si « l’avance technologique des autres pays est monstrueuse et les prix imbattables » comme l’entend Patrice Rosier. Quand le coût des drones français dédiés à la défense peut atteindre 500.000 voire plusieurs dizaines de millions d’euros l’unité, le géant chinois DJI se cantonne à un haut de gamme de quelques dizaines de milliers d’euros tout au plus. Mais dans cette guerre commerciale, les exigences sécuritaires et géopolitiques semblent désormais prendre le pas sur les seules questions financières. Une aubaine cruellement tardive.
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